Les super-héros fades et lisses n'ont plus la cote, c'est un fait certain. Et comme à la BiLA, on aime vous faire découvrir nos coups de coeur, petit mot sur deux BD/Comics qui sentent bon l'antipathique et le farouchement iconoclaste.
Si les dessins sont signés Ben Stenbeck (fidèle collaborateur), c'est bien l'esprit de Mike Mignola qui domine ce
Witchfinder avec ses démons bibliques, ses sectes mystérieuses et surtout un travail graphique extrême, un jeu sur les couleurs et les aplats dans une époque victorienne délicieusement palpable. Witchfinder, c'est Edward Grey, le James Bond de la Reine Victoria (à qui il a sauvé la vie) envoyé pour enquêter et accessoirement éliminer les menaces de type démons, créatures diaboliques et autres poltergeist. Exit l'humour et le côté un peu ronchon de
Hellboy, Witchfinder est une machine gouvernementale implacable, fonctionnaire jusqu'au trognon et d'une sympathie digne d'une pierre tombale. Plutôt expéditif, il se fond parfaitement dans un comics dans la lignée de l'oeuvre de Mignola, une oeuvre à la fois crépusculaire, teintée de cynisme et où le manichéisme n'a pas sa place, surtout pas chez le héros.
Bad Ass - Dead End va sans doute plus loin encore dans l'ignominie, conférant le rôle principale à une crapule arrogante, un sociopathe propulsé au devant de la scène avec son super pouvoir de... viser à la perfection quel que soit son arme (du flingue au mégot de cigarette). Créé par Herik Hanna (scénario) et Bruno Bessadi (dessins),
Bad Ass est le parfait contraste de
Witchfinder tant d'un point de vue formel (couleurs flash, dessins amples et peu fouillés, rythme endiablé) qu'éthique (Dead End est un salaud, les super-héros sont ringards, arrogants et incapables). L'oeuvre est peu subtile, c'est un fait, mais complètement barrée et inscrite dans la ligné des "hommages parodiques" en hésitant pas à jouer des codes des comics américains et quelques références culturelles (comme ce commissaire vieillissant, meilleur ami du super héros local).
Deux bandes dessinées aux antipodes stylistiques et qui pourtant se rejoignent dans ce même amour de l'antihéros, de la désacralisation du Sauveur au profit de la réalité, celle des êtres ambigus et plus asociaux que moraux. Deux oeuvres complémentaires et qui offrent un regard rafraîchissant sur un univers de plus en plus balisé. Et c'est à la BiLA !